La querelle des universaux : On appelle ainsi un important débat qui anima la scolastique du Moyen Âge, mais qui, d'une certaine manière, traverse toute l'histoire de la philosophie jusqu'à nos jours. Sans être dupe d'une classification qui simplifie des positions historiquement plus nuancées, on peut dire que toute la querelle des universaux roule sur la question de savoir si les idées générales sont de purs noms créés par notre intellect, des mots sans appui ni correspondance dans la réalité extérieure; si ces abstractions constituent la seule réalité; ou s'il n'existe pas une solution médiane à l'abri de ces deux excès et professant que l'intelligence découvre dans le monde extérieur qui ne comporte que des individualités, le fondement de toute généralisation.

Les nominalistes, ou empiristes, dont le plus célèbre, après Roscelin, chanoine de Compiègne (vers 1050-1120), fut Guillaume d'Occam, au XIV e siècle, considéraient que les idées générales, les universaux, sont uniquement des mots, des noms ; l'intelligence doit s'appuyer sur les objets et phénomènes individuels qui constituent la réalité extérieure pour s'élever à la généralisation. Leurs adversaires platoniciens – tenants du rationalisme, ou réalisme – affirmaient que les universaux (les Idées de Platon) constituent la réalité effective. Après Platon et l'école d'Alexandrie, cette position fut défendue au Moyen Âge par Scot Érigène, saint Anselme et Thierry le Chartrain. Guillaume de Champeaux (1070-1120), l'adversaire de Roscelin, défendit tout d'abord la thèse d'un réalisme absolu, puis céda à l'influence de son élève Abélard (1079-1142). Ce dernier, dressé contre le réalisme excessif et le nominalisme, annonce déjà Kant avec son conceptualisme mais reprend par ailleurs le réalisme modéré élaboré par Aristote et que défendront après lui Averroès, saint Albert le Grand et saint Thomas d'Aquin.